Renouveau plus ou moins contradictoir

Il y avait maintenant quelques jours qu'Amelia s'était installé dans son nouvel appartement: un petit trois et demi dont elle utilisait la pièce supposé servir de salon comme bureau des plus encombré. Elle n'avait eu trop de mal à se faire à la vie, les voisins étaient agréables et elle avait même repérer un petit café sympa qu'elle comptait fréquenter régulièrement. Il fallait en fait surtout dire que la jeune femme continuant son doctorat par correspondance avec l'université grecque où elle avait eu sa maîtrise en neurologie avait eu la chance de s'intéresser au japonais quelques années auparavant et savait parler cette langue assez aisément. Ça facilitait l'intégration, il était impossible de le nier. Malgré tout, pour le moment, sa situation était encore assez instable. Après tout, elle avait peut-être réussi à s'amasser un bon fond monétaire en Grèce, si on comptait les frais d'aménagement et d'université... elle ne serait pas capable de subvenir bien plus de cinq mois si elle ne retrouvait pas un travail entre temps. Un travail, c'était d'ailleurs la raison de la venue de Miss Jensen au Japon: un nouveau défi et l'endroit rêvé de pouvoir développer sa thèse de doctorat.

Elle avait entendu parler de l'Arobase plus ou moins par hasard en fait et elle avait mis un moment avant de se décider à partir. C'était au cours du dîner, pendant le "messimeri"(1), qu'un des collègues, et étudiant en deuxième année de bac, d'Amelia exposa une nouvelle assez particulière. Il racontait que son oncle comptait se faire cloner afin d'obtenir des organes neufs en cas de problème. Rapidement, l'équipe, dont les recherches n'avançaient pas vraiment par manque de volontaire, se mis rapidement à discuter au sujet de l'utilisation de clone entant que cobaye humain pour leurs expérimentations sans répercussion (enfin, au point où ils en étaient bien entendu). Le débat fut assez controversé et personne, à la fin de la discussion ne su où donner de la tête. Après tout, un clone... c'était un être fabriqué et était donc, légalement, propriété du laboratoire l'ayant créé. Ça revenait au même que de tester sur une réplique de tissus humains, tel que le faisait la plupart des laboratoires d'esthétique qui n'avaient pas décider de prendre les prisonniers de prisons fédérales comme cobayes(2). D'un autre côté, un clone ayant hérité d'une conscience était humain et était donc soumis aux mêmes droits et règles qu'un humain. Et cet argument, d'ailleurs, pesa très fort sur chacun des chercheurs réunis pour dîner; il avait, après tout, été celui qu'ils avaient entendu tout au long de leur enfance pour expliquer les lois diverses contre le clonage.

Cette discussion avait hanté Amelia pendant près de deux mois, pendant lesquels elle réfléchissait sur la question. Bien qu'ancienne militante visant à interdire l'utilisation de l'humain en laboratoire lorsque ceux-ci ne respectaient pas les règlementations établis (même si cette période remontait à plus de dix ans), la chercheuse trouvait la solution de l'utilisation de clones comme cobayes fort alléchante et pratique. Et puis, c'était bien moins pire que d'utiliser un autre humain puisque, d'un point de vue technique, un clone était légalement la propriété du laboratoire ou de son acheteur. Petit à petit, l'idée de réussir sa thèse de doctorat par tout les moyens, comprenant le clonage, fit son chemin jusqu'à en arriver à la fameuse décision qui expliquait la présence de Miss Jensen dans un petit café japonais. Elle avait, peu de temps auparavant, envoyé un CV bien fournis à l'Arobase, y ajoutant la liste assez intéressante des quelques publications auxquelles elle avait participé (considérant que la publication de résultat n'est pas si fréquente qu'on pourrait le croire), ainsi que le nom des établissements où elle avaient travailler. Bien sûr, le fait de posséder une double maîtrise était déjà fort impressionnant en soi, mais cette hyperactive du monde scientifique avait de quoi être fière et elle comptait bien le présenter. De plus, comme si ça ne suffisait pas déjà, Miss Jensen présenta, en annexe de sa lettre de présentation, le raisonnement et l'avancement de sa thèse de doctorat. N'allez pas croire qu'il s'agit de vantardise, il s'agit simplement de motivation facilement confondu avec de l'hyperactivité.

Enfin, pour le moment, Amelia se trouvait toujours sans réponse et commençait sérieusement à se demander si elle n'en avait pas un peu trop fait. Mais bon, il faut croire que c'était légitime de vouloir donner une bonne impression de soit pour ce genre de travail. Après tout, elle venait de tout laisser tomber en Grèce pour un poste où on pourrait aisément en choisir un ou une autre qu'elle! Enfin, elle devait garder son calme et c'est pourquoi elle se retrouva a lire un classique de la littérature japonaise, qu'elle avait déniché dans une librairie avoisinante, en sirotant un café. Au fait, ne demandez depuis quand le café est-il sensé détendre... on parle ici d'Amelia Jensen.
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(1)Littéralement, ça veut dire 'milieu du jour'; c'est le moment (de 13h jusqu'à parfois 16h - 17h) où ils en profitent pour manger et se reposer. D'ailleurs, la plupart des bureaux administratifs ferment de 14h jusqu'au lendemain pour cette raison. Pour ça je ne suis pas bien sûr, mais j'imagine que dans le cas d'un hôpital universitaire, on doit seulement parler d'une très longue période de dîner.
(2)Certaines entreprises pharmaceutiques américaines le faisait dans les années soixante, je ne sais pas si c'est toujours le cas aujourd'hui, mais ça m'étonnerait que ça ait changé.

Une planète bleue, un petit grumeau de vie flottant dans l'univers, illuminée par l'éclat bienfaiteur de l'astre diurne, allait son chemin dans le vide intersidéral, insensible à ce que qui se passait sur sa surface. Une surface caractérisée par la diversité du fourmillement qui la parcourait, sur la terre comme dans l'eau, des millions, des centaines de millions de formes de vies existaient sans se douter qu'il existait quelque chose de beaucoup plus grand, de si infiniment plus grand que leur maigre conscience ne pouvait même pas imaginer. Chaque jours, des centaines de millions d'êtres naissaient et mourraient, composant l'immense tissus d'une toile complexe d'harmonie.
Quelque part, à la surface de cette planète se trouvait une ville, une grande ville comme il en existait des centaines, où des créatures qui se nommaient "humains" se réunissaient pour vivre, comportement que l'on retrouvait dans beaucoup de société hiérarchisées telles que les fourmilières. Approchons-nous d'une de ces villes au hasard et observons ce qui s'y passe : des milliers de gens qui s'activent à leur tâche, souvent vitale pour assurer leur existence, tâche ayant pour objectif de gagner sa pitance, se distraire, arranger le cadre de vie, perpétuer l'espèce ou flatter l'ego, et bien d'autres buts encore dont dresser la liste exhaustive serait beaucoup trop long.
Tous ces gens qui s'activent, pour la plupart indifférents à ce qui les entoure, ne pensant qu'à leur être et à leur tâche, créent et détruisent beaucoup de choses, pour la plupart insignifiante, mais qui ont pourtant des conséquences d'une ampleur surprenante. Par effet de réactions en chaîne, de petits détails qu'on pourrait ne même pas remarquer peuvent avoir un immense pouvoir. Approchons-nous encore et cherchons un exemple concret dans la foule de possibilités s'étalant sous nos yeux. Choisissons au hasard un bâtiment – celui-ci – et prenons le temps d'y regarder d'un peu plus près. Cela semble être un immeuble résidentiel, où vivent plusieurs de ces humains si particuliers, si différents des autres espèces peuplant cette planète. Descendons encore et plaçons-nous à leur niveau, nous approchons de l'entrée et... Stop ! Nous avons trouvé quelque chose ! Voyons voir... Ces sortes de boîtes, près de l'entrée, aussi étonnant que cela puisse paraître, servent aux humain à communiquer entre eux, via des messages, écrits sur des morceaux de papier. Il y en a tellement partout, et toutes sont tellement semblables que peu de gens y font attention, et pourtant, ces boîtes ont un pouvoir de décision important sur le monde. Faisons-nous plus petits et entrons dans une de ces "boîtes aux lettres". Qu'y trouvons-nous ? Une enveloppe. Un morceau de papier plié, contenant un autre morceau de papier sur lequel est inscrit le message, destiné au propriétaire de la boîte dans laquelle nous nous trouvons. Une "lettre" comme les humains en écrivent des millions chaque jours, un objet qui n'a donc rien de rare, le comble de la banalité. Et pourtant, ce banal objet, cet insignifiant détail, est un parfait exemple de détails capables de bouleverser beaucoup de choses. Arrêtons-nous et voyons ce message, afin de bien comprendre de quoi je parle.

Mlle Jensen Amelia,

Au nom de la société, nous accusons réception de votre courrier, envoyé le XX mars 2051, faisant état de votre candidature pour un poste de chercheur assigné au département "expérimentations et suivit des produits".
Malgré l'intérêt de votre profil, nous avons le regret de vous informer que malheureusement, la société de dispose d'aucun poste vacant dans le domaine d'emplois que vous recherchez.
Nous vous remercions de votre l'attention portée notre société et vous prions d'agréer nos salutations distinguées.

Carolina Presten
Attachée au Bureau des Ressources Humaines
Section Personnel Scientifique.

Mais... D'accord, je vous prie de m'excuser, je crains d'avoir fait une erreur de coordonnées. Revenons au même endroit, si vous le voulez bien, mais un jour plus tard. On trouve alors dans cette même boîte une autre enveloppe, contenant une autre lettre, apparemment semblable à la première et pourtant... Je vous laisse juger par vous-même.

Mlle Jensen Amelia

Suite à votre courrier faisant état de votre candidature pour un poste de recherche au sein de l'Arobase, vous avez reçu une réponse du Bureau des Ressources Humaines, expliquant que nous ne disposions pas de postes vacant à vous proposer. Cependant, l'examen de votre curriculum vitae, des détails de votre cursus scolaire, et des informations annexes que vous y avez joint, j'estime que vos capacités peuvent représenter un intérêt pour la société et je souhaiterais étudier plus en détails votre candidature. A cette fin, je vous propose de nous rencontrer dans les plus brefs délais, et pour ce faire, de réserver votre journée de Lundi en huit. En cas de réponse positive de votre part, un hélicoptère vous attendra à 6h00 à l'aéroport de Tokyo, voie privée C. N'oubliez pas de vous munir de vos papiers d'identité afin de pouvoir embarquer, ainsi que de tout document pouvant apporter un intérêt lors de l'entretient. Par mesure de sécurité, je vous conseille également de prévoir des effets personnels utiles à un séjour de quelques jours dans le cas où une évaluation positive vous permettrait d'accéder à l'étape suivante de la procédure de recrutement.

Je vous prie d'agréer, Mademoiselle, l'expression de mes salutations distinguées.

Jordan Stee'Leyn
Direction Générale de l'Arobase.

Comme on peut s'en douter après lecture de ce message, qui est pourtant un simple détail dans le vaste monde des humains, un tel objet est lourd de conséquences. Ce minuscule petit objet, un détail dans le paysage, si insignifiant que personne n'y porterait attention, a pourtant le pouvoir de bouleverser le cours d'une vie, qui elle-même pourra, par réactions en chaîne, en bouleverser d'autres, et ainsi de suite jusqu'à épuisement du pouvoir de ce morceau de papier.

Citation :

Mlle Jensen Amelia

Suite à votre courrier faisant état de votre candidature pour un poste de recherche au sein de l'Arobase, vous avez reçu une réponse du Bureau des Ressources Humaines, expliquant que nous ne disposions pas de postes vacant à vous proposer. Cependant, l'examen de votre curriculum vitae, des détails de votre cursus scolaire, et des informations annexes que vous y avez joint, j'estime que vos capacités peuvent représenter un intérêt pour la société et je souhaiterais étudier plus en détails votre candidature. A cette fin, je vous propose de nous rencontrer dans les plus brefs délais, et pour ce faire, de réserver votre journée de Lundi en huit. En cas de réponse positive de votre part, un hélicoptère vous attendra à 6h00 à l'aéroport de Tokyo, voie privée C. N'oubliez pas de vous munir de vos papiers d'identité afin de pouvoir embarquer, ainsi que de tout document pouvant apporter un intérêt lors de l'entretient. Par mesure de sécurité, je vous conseille également de prévoir des effets personnels utiles à un séjour de quelques jours dans le cas où une évaluation positive vous permettrait d'accéder à l'étape suivante de la procédure de recrutement.


Je vous prie d'agréer, Mademoiselle, l'expression de mes salutations distinguées.

Jordan Stee'Leyn
Direction Générale de l'Arobase.

Aéroport de Tokyo
Voie privée C
5h45

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